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jeudi, mars 28, 2024

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L’éducation nationale: l’orpheline de la République de Guinée

Historique de l’école guinéenne

La République de Guinée. Voici un récapitulatif de l’éducation après 63 ans de l’indépendance

L’ histoire de l’école guinéenne remonte à la période coloniale. En fait, si on évoque ici le terme école, on fait allusion à celle occidentale. Car bien avant cette époque et même jusqu’à présent, il y a l’école coranique.

L’ administration française a donc formé la première génération de cadres guinéens. Beaucoup d’entre eux, ont poursuivi leurs cycles d’abord à la célèbre école William Ponty de Dakar et ensuite dans des universités françaises.
Parmi eux, on peut citer entre autres : Diallo Tely (premier secrétaire général de l’OUA), Barry III leader du bloc africain de Guinée (BAG), Sékou Touré ou Fodeba Keïta…

Malheureusement, Nombreuses de ces élites ont été liquidées par le régime dictatorial de Sekou Touré.

Après l’indépendance du jeune Etat,
la Guinée s’est dotée d’établissements d’enseignement supérieurs supplémentaires : universités Gamal Abdel Nasser de Conakry (en 1962) et Julius Nyéréré de Kankan (en 1964)

Par ailleurs, à partir des années 70 Sékou Touré introduira l’enseignement des langues locales dans le système scolaire. La multiplicité des langues contribuera à limiter le succès du programme d’enseignement.

L’avènement de la deuxième république a bouleversé la tendance. En effet, le nouveau président Lansana Conté qui s’est emparé du pouvoir le 3 avril 1984, préféra orienter le pays vers un système libéral après 26 ans de socialisme. Désormais, le pouvoir encourage les initiatives privées.

Officiellement, l’école est gratuite et obligatoire en Guinée pour chaque enfant de 7 à 12 ans. Au début des années 1990, seulement 30% des enfants en âge d’aller à l’école étaient scolarisés selon L’UNESCO.

Il convient de noter néanmoins q’aucune loi ne contraint les parents à amener leurs enfants à l’école. La faible scolarisation se constate souvent dans les zones rurales et affecte sérieusement la couche féminine.
Dans plusieurs familles on pense que mettre la fille à l’école est une perte de temps. Ces convictions sont renforcées par des facteurs comme : la pauvreté ou la culture.

Cependant, on assiste depuis un certain temps à un renversement de situation. En effet, le taux de scolarisation augmente à grand pas aussi bien chez les garçons que chez les jeunes filles. De tels progrès sont la conséquence des différentes campagnes de sensibilisation autour de ce sujet. Mais il reste encore beaucoup à faire!

Ces résultats louables ont quand même comme on pouvait s’y attendre entraîné une hausse des effectifs. Les écoles sont devenues saturées en raison de leur insuffisance. Illustration de cette triste réalité dans les villes urbaines! À Conakry la capitale on peut dénombrer les lycées publics comme suit :

deux à Kaloum, un à Dixinn, trois à Matam et un nombre insuffisant dans les deux plus grandes communes (Ratoma et Matoto). Dans les différentes préfectures seulement quelques-unes ont plus d’un lycée public. Rares sont des sous-préfectures qui disposent encore des lycées.

La situation est lamentable au niveau du primaire et du secondaire. Il y a plus d’écoles primaires que de collèges et plus de collèges que de lycées. La raison d’une telle disparité s’explique par le fait que les partenaires du système éducatif : japonais, allemands…s’impliquent beaucoup plus dans la construction d’écoles primaires. Ce programme s’inscrit dans le cadre de la promotion de l’éducation universelle pour tous.

Dans l’enseignement supérieur c’est encore le même constat. Au delà de Gamal et Julius Nyéréré, le régime Conté n’a presque ou pas doté le pays d’universités. En lieu et place, on a érigé des instituts dans les 4 coins du pays. Ils sont en tout une vingtaine.

Aujourd’hui, l’enseignement privé a pris de l’essor. Primaires, collèges, lycées et universités poussent comme des champignons. Toutefois la qualité de la formation reste à désirer.
Des infrastructures inadéquates par endroits et des équipements là où ils existent sont jugés obsolètes.

Pour faire face au manque de places dans les universités publiques, l’Etat a fait appel aux opérateurs privés de l’enseignement. Le contrat est simple, à la sortie des résultats du bac le ministère de l’enseignement supérieur oriente une partie des bacheliers dans le privé.

Ces derniers sont appelés ‘’boursiers de l’État’’, c’est-à-dire le gouvernement prend en charge les frais de scolarité de chaque étudiant jusqu’à la fin du cycle, qui s’élevait par fois jusqu’à hauteur d’une quinzaine de millions par an. Chose que l’Etat a mis fin depuis 2017. Il faut noter que depuis 2007, c’est le nouveau système LMD (licence, master, doctorat) qui est étudié. Un système décrié par beaucoup d’observateurs.

Dans le privé, l’étudiant ne paye rien et ne perçoit rien. Au contraire, dans l’enseignement supérieur public, l’étudiant reçoit à la fin de chaque mois une bourse d’entretien nommée ‘’pécule’’.

La somme varie entre 90 et 105.000fg. Dans les deux cas, c’est à l’étudiant de trouver les frais d’inscription qui varient entre 10 et 250.000FG plus des paquets de papier rame.

L’innovation qui consiste à impliquer les privés dans la gestion de l’enseignement supérieur a favorisé une prolifération d’universités. Les plus convoitées sont L’UKAG et L’UNC, toutes situées dans le même quartier en banlieue de Conakry.
Cette multiplication touche également l’enseignement secondaire et élémentaire. Mais contrairement au supérieur, là l’Etat ne prend pas de part active. Chaque année, les parents d’élèves se plaignent de l’augmentation « fantaisiste » de la scolarité.

L’école Guinéenne manque aussi et surtout de confort: Pas de toilettes adéquates, pas de mobiliers dans la plupart des cas, des effectifs pléthoriques, des bâtiments vétustes.
Les universités quant à elles ne disposent pas de dortoirs, ni des bibliothèques modernes et équipées, ni des bus de transport faisant des étudiants des abandonnés à eux-mêmes.

Formation professionnelle: secteur qui devrait être le moteur de tout développement mis au second plan, très méconnu par beaucoup de Guinéens. Ici sont majoritaires ceux qui estiment n’avoir pas réussi de l’autre côté. Et pourtant dans beaucoup de pays, c’est r le secteur le plus générateur d’emploi, car l’enseignement technique voudrait dire enseignement de « métiers ». Mais le matériel d’application en manque énorme. Il faut rappeler que les plus essentielles sont: L’ENAM de Coléah, ENSAC de Donka, les écoles de SANTÉ et les CFP (Centre de Formation Professionnelle) se trouvant dans certains centres urbains.

À date l’enseignement professionnel compte 124 filières.

Les enseignants Guinéens quant à eux ne bénéficient pas des formations de perfectionnement, mal payés, conséquence ils tirent le diable par la queue.
Ils vont le plus souvent en grève et se battent pour l’application de leur statut particulier. Les grèves en répétition dans les 10 dernières années ont forcément contribuer à la détérioration des niveaux des apprenants.

Les programmes d’enseignement très critiqués de par leur constance et manque d’harmonisation. L’INRAP (L’Institut National de Recherche et d’Action Pédagogie) chargé d’élaborer, d’amender et de vulgariser les contenus des programmes n’est qu’un service des copains qui est déconnecté et déconcentré de toute recherche visant à améliorer les différents programmes existants. Pour preuve, le programme en vigueur n’a pas connu de retouche depuis une douzaine d’années! Chose déplorable.

Les structures syndicales: nous avons principalement la FSPE, le SLECG et le SNE… ces syndicats qui estiment être en train de défendre l’intérêt des travailleurs sont pour la plupart dans les collimateurs des gouvernants.

Dans les différents gouvernements qui se sont succédé à la tête du pays, une place de choix a été accordée à la dénomination du ou des départements en charge de l’éducation. MEPUA, MEN-A, MESRS, METP…
Tantôt on parle de ministère de l’éducation nationale, tantôt on scinde le département en trois pour donner : enseignement pré universitaire et de l’éducation civique ou bien enseignement supérieur sinon enseignement technique et professionnel.
Pourtant, cette diversité ne résout guère les problèmes.

Pour les examens il y a le premier qui est le CEP (certificat d’étude du primaire) qui sanctionne les 7 premières années de l’elementaire, le BEPC (brevet d’étude du premier cycle) met fin aux 4 ans d’études au collège et enfin le BACCALAURÉAT intervient après 3 ans au lycée.

Depuis 2006, le concours d’accès aux institutions d’enseignement supérieur a été remplacé par une sélection à l’orientation. En 2007, le système de BAC unique a été instauré pour remplacer la vielle méthode de BAC1 ( niveau 12ème) et BAC2 ( niveau Terminale).

Les classes du lycée sont : la 11ème année, la 12ème  année et la Terminale et les options sont au nombre de 3,  il s’agit des sciences: expérimentales(SE), mathématiques(SM) et sociales(SS).

Il faut également signaler que Pendant
•la première République pour être enseignant au primaire, il fallait:
– Avoir le niveau 12ème ou 13ème ( Terminal)
– Étudier pendant 3 ans dans une ENI (École Nationale d’Instituteurs)
– Être certifié par un concours.
– Faire un stage avec un confirmé pendant six (6) mois.

•Pendant la deuxième République, la formation d’un maître du primaire durait tout juste six mois avec aucun critère de niveau, même les vendeuses des cacahuètes enseignent dans nos écoles.

Pendant la troisième République, il faut être contractuel durant des longues années et après déclencher des mouvements des grèves pour être titularisé. À défaut être un fervent militant du parti au pouvoir!

Après 63 ans d’indépendance, la Guinée ne répond toujours pas aux attentes réelles pour un véritable sursaut scientifique.
Les entreprises locales et étrangères continuent jusqu’à présent à exploiter l’expertise provenant de l’étranger. L’existence des CHU de Donka et Ignace Deen plus la faculté de la médecine de GAMAL n’empêche pas des évacuations énormes des malades guinéens au Sénégal ou au Maroc pour des soins médicaux appropriés.
Les plus grands chantiers d’ingénierie sont souvent gérés par des ingénieurs d’une expertise étrangère. Cependant des facultés d’ingénierie existent dans nos universités.

Nous Guinéens, nous devons tirer toutes les conséquences pour que nous sortions maintenant de ce cycle infernal qui continue de déchiqueter notre système éducatif depuis l’indépendance.

– Vive un système éducatif performant
– Vive l’école guinéenne
– Vive des réformes réelles et pérennes de l’éducation guinéenne.

Bonne fête de l’indépendance à toutes et à tous!
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Alpha Mamadou Tolo Bah, professeur de
Maths/physique.
Acteur du système éducatif!

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