Basée à Accra au Ghana et oeuvrant depuis des années pour la promotion et la protection de la liberté de la presse et d’opinion en Afrique de l’ouest et partout sur le continent, en communion avec ses partenaires, la Fondation pour les Médias en Afrique de l’Ouest suit de près les nouveaux développements dans les monitoring des violations des droits des médias en Guinée . Lisez cette déclaration sur les récentes violations dans ce pays.
Suite à des actes répressifs à répétition posés par les autorités guinéennes, les organisations professionnelles des médias du pays ont décrété, ce 23 mai 2023, une journée sans presse. Par conséquent, la presse audiovisuelle et écrite indépendante, ainsi que journaux en ligne ne feront pas de publications en ce 23 mai.
Au-delà de la journée sans presse, les associations ont également entrepris de boycotter toutes les activités du gouvernement et les autres organes de la Transition jusqu’à la levée de toutes les restrictions ; boycotter de la Semaine Nationale des Métiers de l’Information et de la Communication (SENAMIC) ; et d’organiser une marche de protestation le 1er juin 2023 sur toute l’étendue du territoire national.
A la base de cette décision qui sonne le ras-le-bol de la presse guinéenne se trouvent des incidents récents de violations contre la presse. A titre illustratif, le 18 mai 2023, des gendarmes présumés de l’Autorité de Régulation des Postes et Télécommunication (ARPT) ont pris d’assaut au siège du Groupe de presse Afric Vision à Conakry, la capitale de la Guinée.
Selon M. Sanou Kerfalla Cissé, le Président Directeur Général de ce groupe, les assaillants ont démonté et emporté les émetteurs des deux stations de radio du groupe, notamment Sabari FM et Love FM. L’action a empêché les deux stations de radio de fonctionner. M. Cissé confie que les gendarmes n’ont pas décliné les raisons du démantèlement. Lorsqu’il a pris attache avec l’ARPT pour comprendre les motifs de cet acte, il a fait face à un silence total.
Cet acte, qui semble être la goutte d’eau qui fait déborder le vase de patience et de tolérance des médias, intervient dans la semaine où les principaux sites d’information guinéens et les réseaux sociaux font l’objet de limitation drastique. L’interruption de l’Internet a été ordonnée pour contrecarrer le groupe de pression politique Forces Vives de Guinées (FVG) qui a appelé la population à descendre dans la rue pour protester contre le gouvernement de transition.
« Les métriques de NetBlocks confirment la restriction de Facebook, WhatsApp, Instagram, TikTok et d’autres plateformes de médias sociaux en Guinée-Conakry le mercredi 17 mai 2023 » révèle NetBlocks, la plate-forme de suivi de l’Internet dans le monde.
Ce n’est pas tout, les autorités, à part ces mesures de restrictions, lorsque les citoyens veulent prendre les rues pour exprimer leur mécontentement, ils font face à l’armée et à la police, qui ne vont pas de main morte pour réprimer toute forme de manifestation.
Les multiples atteintes aux droits des citoyens et des médias, quoique très souvent dénoncées, suscitent une faible, voire aucune, réactions de la part des autorités. Les auteurs de ces violations jouissent d’une liberté extraordinaire dans une impunité totale.
Dans ce contexte de troubles politiques et d’amenuisement de l’espace civique, les associations de presse, qui jugent les actions du gouvernement hostiles à la presse, déclarent son porte-parole, le ministre Ousmane Gawal Diallo, ennemi de la presse.
En guise de protestation contre ces agissements, elles ont rendu publique le 18 mai 2023, une déclaration commune dans lequel elles condamnent « les actions liberticides engagées par l’Autorité de Régulation des Postes et Télécommunications contre les médias guinéens ».
« Ces actions dont les débuts ont coïncidé avec la nomination de M. Mamady Doumbouya, comme Directeur Général de l’ARPT, ont consisté d’abord à ralentir puis arrêter l’accès aux principaux sites d’informations guinéens. Ces actions se sont poursuivies depuis le mercredi 17 mai 2023 par le ralentissement, voire le blocage de l’accès à certains réseaux sociaux dont Facebook et WhatsApp et par une descente des gendarmes au groupe de presse Afric Vision pour démonter les émetteurs des radios Sabari FM et Love FM » lit-on dans la déclaration commune.
La réaction des organisations professionnelles de presse est indicative du sentiment partagé d’injustice et d’inquiétude face aux multiples exactions des autorités guinéennes.
La Fondation des Médias pour l’Afrique de l’Ouest (MFWA) est profondément préoccupée par les actes répétitifs qui porte atteinte à l’espace civique, la liberté d’expression, et la liberté de presse, fortement menacés en Guinée. Nous exhortons le gouvernement de Transition de la Guinée à entamer un dialogue avec les acteurs médiatiques afin d’instaurer une confiance mutuelle et un climat propice à la jouissance des droits à la liberté de la presse et l’accès à l’information.