20.3 C
New York
vendredi, novembre 1, 2024

Buy now

spot_img

Massacre du 28 septembre : Amadou Diallo BBC donne sa version des faits

Le procès des événements du 28 septembre s’est poursuivi ce mardi 17 octobre 2023, au Tribunal criminel de Dixinn, délocalisé à la Cour d’Appel de Conakry. Le journaliste Amadou Diallo, ancien correspondant de la BBC a témoigné sa part de vérité.

À la barre, Amadou Diallo déclare avoir été au stade aux environs de 8 heures. Il dit qu’il a trouvé le Colonel Moussa Tiegboro Camara sur place, et il disait aux manifestants de retourner à la maison. Les gens n’ont pas voulu accepter.dit-il.

Peu avant les tirs, Amadou Diallo, souligne qu’un gendarme avait fait un signe de geste à ses collègues. Lorsqu’un gendarme s’est retiré, il y a eu des tirs de gaz lacrymogène.

« J’ai décidé d’aller chez Jean Marie Doré, où  se trouvaient les leaders. Arrivé au niveau de l’Université Gamal Abdel Nasser, j’ai trouvé un cordon sécuritaire. Le colonel Tiegboro est arrivé à pied accompagné de deux pick-up. Il a demandé aux leaders de renoncer au meeting. Il y a eu une discussion entre lui et Sidya Touré. Il a demandé à Sidya

« Qu’est-ce que le président vous a dit hier? ».

Sidya Touré a répondu   » Il m’a demandé de reporter la manifestation, mais je ne pouvais pas parce qu’il était une heure du matin ».

Le Colonel Tiegboro réplique en disant « Non, il n’était pas une heure , j’étais à côté » .

Entretemps, Mouctar Diallo, leader des NFD a commencé à parler. Tiegboro a dit « hé hé, c’est lui qui parle ici, je lui rentre dedans, moi je parle aux grands leaders ».(…) lorsque les militaires de la garde ont fait irruption, la débandade a commencé. Il y avait une bousculade folle » a-t-il expliqué

Et il ajoute que lorsqu’il a vu Mouctar Bah, il l’a appelé et ils se sont arrêtés sous un cocotier. Il a dit de ne pas fuir, de rester ici

« Le pire peut nous arriver, c’est une arrestation. Entre temps, un jeune soldat qui arrive, très menaçant, nous a demandé ce qu’on ferait là, nous lui avons répondu que nous sommes des journalistes, correspondants de RFI et de BBC en Guinée. Il n’en fallait pas plus pour qu’il se déchaîne sur nous.

« C’est vous qui vendez la Guinée à l’étranger ». Il a braqué son arme sur nous. Il nous a agenouillés au même moment. Un militaire qui a son arme face à des journalistes qui n’ont que leurs bics, on ne pouvait pas résister. Il nous a demandé de mettre les mains au dos. Et c’est là que j’ai eu peur. Je pensais qu’il voulait nous exécuter. C’est après qu’un militaire haut gradé est venu dire au soldat de nous laisser parce qu’on était ensemble à Labé à l’occasion de la visite de Dadis dans la ville le 27 septembre 2009. Même cet officier qui nous a sauvé, a violenté, se déchaînait sur les manifestants, les tabassait. J’ai vu des corps allongés, j’ai vu des personnes blessées, la violence se poursuivait sans répit. Arrivé au niveau du grand portail, le policier qui nous escortait s’est arrêté, il a levé les mains il a dit ma mission s’arrête ici. Pour traverser une distance de moins de 100 mètres, c’était une éternité. J’ai vu une femme militaire, à qui j’ai demandé de l’aide. Elle a pris son fusil, elle nous a aidés à traverser la route.» a-t-il savoir

En face de la station de Dixinn, il précise qu’ils ont croisé un groupe de gendarmes. Ils étaient habillés en T- shirt noir. Après qu’ils se sont présentés, ces derniers les ont dépouillés téléphones, argent et autres.

« J’avais des sons, des bons sons, que je ne voulais qui tombent dans les mains des gendarmes. Le jeune Kati a surgi, il a présenté son badge CNDD, il s’est imposé, il a demandé à ce qu’on nous libère. Il a sorti de sa poche plusieurs téléphones qu’il avait brigandé je présume. On s’est retrouvé au domicile de maître Amara Bangoura. Pendant toute la journée, une bonne équipe de reporters s’est retrouvée sur place. Nous avons transformé la concession en une salle de rédaction. Nous avons travaillé là-bas. Après la manifestation, les militaires traquaient les jeunes dans le quartier. Vers 18 heures, nous avons décidé de quitter puisqu’il y avait moins de tirs. Mais le chemin était dangereux. Il n’y avait que les camions militaires qui circulaient. Et ça ferait peur. Quand je suis arrivé chez moi, je n’avais pas le vocabulaire pour expliquer le calvaire que j’ai traversé. J’ai dis à mes enfants « personne d’entre vous ne sera militaire » a-t-il dit

Le journaliste confirme que c’est la diffusion du reportage qu’il avait fait au moment des faits qui a causé problème parce que la garde présidentielle a commencé à le traquer.

« J’ai reçu trois appels dont un qui provenait de la garde rapprochée de Dadis qui me connaît, qui connaît mes enfants. Donc il a appelé mon fils, il lui a demandé de me dire de quitter. J’ai reçu un autre appel d’un colonel qui m’a aussi demandé de quitter ma maison. Un ancien ministre m’a aussi appelé le mardi à 23 heures, lui aussi m’a demandé de quitter. Je vivais avec ma mère qui avait 90 ans, donc fragile

Mon premier fils était au lycée, donc c’était des enfants. Finalement, à zéro heure, je décide de partir. Ma femme m’a déposé à Kipé chez Alhassane Sylla (un autre journaliste), elle est rentrée à la maison. Mon épouse a amené ma maman à Ratoma chez mon grand frère. On a quitté le quartier sans dire au revoir.

Quelques jours après, je suis allé dans un hôtel à Taouyah où je suis resté pendant une dizaine de jours. Je me suis concertée avec la famille, on est rentré à la maison, mais c’était difficile. On était barricadé. Je suis rentré dans la clandestinité jusqu’au jour où la BBC a décidé de nous exfiltrer pour aller à Dakar. On a ramené ma mère au village, une année après, elle est décédée. Je n’ai pas pu vivre les derniers instants de ma mère» a témoigné Amadou Diallo

Le journaliste ne réclame que justice, parce qu’il a été violenté, traumatisé, jusqu’à s’exiler

Par Fodé Touré pour couleurguinee.com

AUTRES ACTUALITÉS

- Publicité -spot_img

PUBLIREPORTAGE