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Transition :  » l’appel sur l’actualité » de RFI est à Conakry

Aliou Bah, le président du parti Model, Me Halimatou Camara, avocate et Chaikou Oumar Baldé, conseiller du Premier ministre Amadou Oury Bah étaient les invités de l’émission « Appel sur l’Actualité » de Radio France Internationale le lundi dernier. Pour l’enregistrement d’une émission diffusée ce mardi. Le modérateur, Juan Gomez a soumis les invités à des questions relatives à l’actualité nationale.

Juan Gomez

 

Ces invités, ont chacun décliné son point de vue sur les questions posées par le journaliste français

Du coup d’État du 5 septembre 2021

Juan Gomez a interrogé chacun des trois invités sur leurs ressentis ce jour.

Me Halimatou Camara, avocate, activiste, défenseur des droits humains ouvre le bal.

Me Halimatou Camara, avocate défenseur des droits de l’homme

« J’avoue, quand il y a le coup d’Etat le 05 septembre et que j’ai vu les premières images du Colonel à l’époque, j’ai eu un sentiment de peur. Un sentiment de peur parce que il était quand même à la tête des forces spéciales. Et pour moi ces personnes là n’étaient pas des personnes fréquentables. J’avais vu qu’il y a l’euphorie. Mais, je suis un peu du genre réaliste, parce que j’ai compris qu’en 1984, on était tous content, en 2008 on était tous content. Et je me disais qu’il fallait qu’on gagne en maturité et qu’on observe pour une fois. Donc, j’ai observé et je n’ai pas été surprise de la suite des choses. Parce qu’en Guinée, nous avons un système civilo militaire, qui est un système qui n’est pas tendre avec les populations » a dit l’avocate.

Saikou Oumar Baldé, le Conseiller du premier Ministre Amadou Oury Bah a aussi évoqué son ressenti ce jour

Saikou Oumar Baldé, Conseiller du premier ministre

« Au début, j’étais vraiment inquiet de la façon dont s’est passé le coup d’Etat. Et je me suis dis, mais on va nous amener où encore. Parce que avec la transition, je me suis toujours dis personnellement que ce n’est pas du tout la solution pour mener un pays à bon port. Parce qu’avec les militaires c’est toujours un peu compliqué. Les autres coups d’État ont été applaudis. Sauf que les résultats n’ont pas toujours été ce que la population attendait » dit-il

Juan Gomez a rappelé que l’eau a coulé sous le pont depuis et que nous sommes à mi novembre, aucune date de la fin de la transition  n’est donnée pour l’instant ?

Et pour répondre, le conseiller et également représentant du premier ministre à ce débat.

« Je ne suis pas déçu, mais je suis impatient que ça se termine. Pour que nous puissions construire pour le pays, il faudrait que nous puissions passer aux civils » a-t-il fait remarquer.

Aliou Bah, le président du parti Model prend le relai pour une séance de rattrapage sur ses premières émotions à la prise du pouvoir par les militaires le 5 septembre 2021.

Aliou Bah, président du parti Model

« Le matin du 05 septembre, honnêtement je n’étais pas surpris. Parce que tout le monde voyait que la situation se détériorait et que le système s’était gangrené de l’intérieur. Et que le régime était très affaibli suite à la mobilisation citoyenne et politique dans le cadre du FNDC contre le troisième mandat d’Alpha Condé, ancien président, sur le changement de la constitution. Et il se trouvait que ceux qui tournaient autour du pouvoir n’étaient pas sérieux avec le président. Donc c’était un régime qui était en sursis. Je n’étais pas vraiment surpris. Parce que quelque jour avant le coup d’Etat, dans un média du pays, je me disais que tout semblait aller dans tous les sens et que le président ne contrôlait plus la situation. Mais j’ai eu un sentiment de prudence d’autant plus que ce sont les mêmes éléments qui alimentaient le système et qui se sont présentés comme étant les responsables du coup d’Etat. C’est une mauvaise répétition de l’histoire c’est-à-dire en 1984, le système a généré ce qui l’a fait chuté, en 2008 c’était la même chose. Mais les forces spéciales c’était l’émanation du régime d’Alpha Condé. Donc il n’y a pas de raison de croire que ça puisse être différent. Mais on s’est donné un espoir parce que c’est le résultat aussi de notre but. La fin du troisième Mandat était une satisfaction totale pour nous. Mais nous sommes restés prudents et vigilants. C’est pourquoi personnellement et l’organisation que je dirige nous avons pris la posture de la prudence de la prudence. Et je crois que le temps nous a donné raison », a expliqué Aliou Bah

Juan Gomez interroge à nouveau le conseiller du Premier ministre, sur la conduite de la transition. Il répond

« Le coup d’Etat, je n’ai pas été surpris. En tant qu’enseignant chercheur, j’avais produit un mois avant la prise du pouvoir , un article sur les vicissitudes autour des processus électoraux, notamment du changement constitutionnel. Et mon livre est sorti trois jours après le coup d’Etat. Un coup d’Etat salutaire oui, parce que ça vient répondre en quelques sortes à nos besoins de changement, qui étaient, qui étaient exprimés notamment par le FNDC, par un parti politique, par un certain nombre d’acteurs qui voulaient avoir ce changement là. Il y a un processus à construire. L’idée ce n’est pas de bâcler les étapes. Ce processus de 2020, résulte de l’absence du sérieux que nous avons connue ces dernières années ».

Puis, Juan Gomez se tourne vers l’auditeur Abdoul. Il s’est exprimé sur la question relative au processus de dissolution, et de suspension des partis politiques.

« 54 partis politiques dissous, 53 suspendus et 67 mis sous observation par le ministère de l’Administration du territoire. Sauf que nous, ce n’est pas le problème de suspendre ou d’évaluer qui a fait le problème. C’est sur le critère sur lequel le ministère s’est basé pour évaluer ces différents partis politiques. Les raisons évoquées ne nous ont pas convaincus. Pour nous, ce sont des obstacles qu’on est en train de chercher pour éliminer les uns et maintenir les autres afin qu’ils frayent un chemin vers le pouvoir. Ça ne devrait pas être le projet de la transition. Les Guinéens sont libres de créer les partis politiques… Peut-être ces partis politiques peuvent être des obstacles pour le pouvoir, on trouve tous les prétexte pour les éliminer » assène -t-il.

Aliou Bah du Model s’appuie sur cette analyse de l’auditeur pour rebondir sur le cas de l’évaluation des partis politiques.

« Deux anomalies majeures. D’abord, la première, il n’appartient pas à une autorité d’évaluer les partis politiques. Ce sont les électeurs qui évaluent un parti politique. Un parti politique est destiné à aller aux élections. Qui vous évalue pour savoir si vous êtes en règle. En réponse, on aurait dit au CNRD de nous présenter son agrément. Alors, sur la base de quoi cette évaluation des partis politiques a été faite. C’est prétentieux. D’ailleurs le thème lui-même, nous l’avons récusé. Et lorsque nous avons étudié la procédure elle même, nous nous sommes rendus compte qu’en réalité il y a un agenda caché. Parce que le fait de mettre les partis en observation, pour des partis comme le nôtre, on nous reproche par exemple des questions de fonds. On vous dit que vous n’avez pas paraphé toutes les pages de vos états financiers. Alors que de façon très simple, lorsque l’administration a besoin de vérifier les compte d’un parti politique, vous avez juste à interroger la banque et voir la réalité des états financiers. En plus, le ministre tient plus un discours politique que technique. Il y a une menace qui plane. On sait que sur la base des engagements pris à savoir la fin le 31 décembre de la transition. Le chef de la transition, le Général Mamadi Doumbouya avait dit qu’un jour de plus ne passerait pas. Jusqu’à preuve du contraire, nous nous en tenons à cela. Maintenant, trouver de quoi occuper les partis politiques(..). Les organisations politiques sont plus légitimes que la junte. Donc il ne relève pas de la compétence de la transition de suspendre les partis ou de les évaluer  », a lâché Aliou Bah.

Juan Gomez a interrogé l’auditeur Alpha pour savoir ce qu’il en pense de la suspension de partis politiques. Et il répond.

« J’ai salué cette décision avec d’autant plus de raisons, qu’en 2020, j’ai fait un mémoire de master en science politique dont la thématique portait sur les partis politiques en Guinée. Alors jusqu’au mois d’octobre 2020, il y avait 184 partis politiques. Aujourd’hui plus. L’ensemble de ces partis, il n’y a pas 5 qui sont capables de tenir des assemblées générales hebdomadaires pendant toute l’année. Alors que les partis politiques au moins, ce sont les militants, c’est l’implantation, c’est l’éducation politique du militant… Malheureusement, le désordre qui y était a fait qu’il est devenu très compliqué de saisir le système des partis guinéens tant sur sa nature, sa composition et son orientation pourvu qu’il respecte le cadre normatif. ll y a une charte des partis politiques qui existe depuis 1999, avec la réintroduction du multipartisme en Guinée. Mais, aujourd’hui, cette charte est mise de côté. Les partis politiques préfèrent utiliser les statuts et règlement de leur propre partis politiques » a rappelé Alpha

Et Me Halimatou Camara de s’exprimer à ce sujet : « Je prends cette décision avec beaucoup de pincettes. Parce qu’il est beau de faire le toilettage des partis politiques. Mais aujourd’hui, on est quand même dans un contexte où il ne faut pas se tromper. Ce contexte est que le Général Mamadi Doumbouya, va certainement se présenter aux futures élections. Et aujourd’hui, on est face d’une administration oú le ministère de l’Administration du territoire et de la Décentralisation  est quand même juge des partis. C’est extrêmement compliqué. On a beau vouloir dire que les partis politiques ne respectent pas les règles, ne sont pas dans les normes. Mais, il faut quand même dire qu’aujourd’hui, ceux qui sont censés incarner une certaine légitimité ne respectent pas leur parole » a dénoncé Me Halimatou Camara

Le conseiller du premier ministre a son avis.

« Pour une première fois en République de Guinée, il y a eu un processus d’évaluation des partis politiques sur la base de la charte des partis politiques, notamment la loi L91001 en son article 21 qui donne cette compétence au ministère de l’administration du territoire. Maintenant, le processus est perfectible. Tout processus est perfectible mais ça montre le ton » dit Chaikou Oumar Baldé

Aliou Bah a usé son temps de parole concernant ce sujet.

« La procédure elle même, souffre de beaucoup d’insuffisance. D’abord le fait que le ministère a avoué. Ils ont utilisé un logiciel Standard et ils ont appliqué les mêmes résultats à l’ensemble des partis politiques. Lorsqu’on reproche à un parti politique de n’avoir pas tenu un congrès, d’abord il n’appartient pas au ministère de déterminer quand est-ce qu’un parti doit organiser un congrès. L’organisation du congrès d’un parti politique relève des statuts du parti politique  » a-t-il expliqué

Parlant du processus de vulgarisation en court de l’avant projet de la nouvelle constitution, l’opposant guinéen, Aliou Bah estime que c’est une forme de campagne électorale déguisée.

« Lorsque vous allez dans les villes, ce qui se passe, les missions viennent de Conakry. On met la pression sur les fonctionnaires locaux. On les réunit quelque part. On prend des images de propagande, on sort des enfants de l’école et on met la pression sur les enseignants. On va dans les marchés, on menace les gens qui ont des étagères. On leur dit si vous ne venez pas on vous retire les espaces. C’est ce que les populations guinéennes vivent au quotidien. On organise une propagande, on prend des images, on dit qu’on est venu vulgariser la constitution. Et derrière, c’est promouvoir une possible candidature du général Mamadi Doumbouya. Mais là, le piège se situe à quel niveau? Nous avons freiné les velléités de la candidature de Moussa Dadis Camara qui aujourd’hui est en prison par le fait d’avoir voulu confisquer le pouvoir et le 28 septembre a été organisé. Le Général Mamadi Doumbouya n’est pas plus guinéen que Dadis(..) » a martelé Aliou Bah

Le débat était houleux sous l’arbitrage de Juan Gomez. Et chacun a semblé y trouver son compte.

Par Fodé Touré pour couleur guinee

 

 

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