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dimanche, novembre 24, 2024

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Enquête : le groupe Lynx dévoile des maillons faibles de l’économie nationale

Le groupe de presse Lynx-Lance a présenté ce mercredi les résultats d’un travail de recherche qu’il a mené sur des maillons faibles de l’économie nationale.

Ce travail est le fruit d’une assistance technique et financiere de OSIWA pour la mise en place d’une cellule d’investigation spécialisée sur les crimes économiques en Guinee.

Depuis 2020, le groupe de presse Lynx-Lance enquête sur des sujets qui portent sur le tabac, la production du riz, les conditions carcérales, le budget, les mines et autres.

Diawo Labboyah Barry, un des journalistes du groupe a mené des enquêtes sur le tabac. Il a rapporté les raisons pour lesquelles le tabac coûterait moins cher en Guinée que dans les autres pays de la sous-région.

De ses explications, il ressort que la Guinée figure parmi les pays qui ont ratifié la convention qui vise à harmoniser les taxes sur le tabac et l’alcool dans l’espace CEDEAO.

Mais, révèle-t-il, en Guinee, il y a des combines et des arrangements qui jouent sur l’efficacité de la demarche contrairement au Maroc qui a une taxe de 75%  appliquées sur le tabac.

Ce reporter du groupe soutient que si l’Etat guinéen faisait un suivi de l’importation du tabac, cela pouvait donner beaucoup de ressources. Diawo Labboyah ajoute que malgré des taxes fortes sur le tabac, le Maroc renferme un plus grand nombre de fumeurs et de toxicomanes que la Guinée.

« La remarque que je vous ferai, c’est que beaucoup estiment que les gens sont toxicomanes ou que les gens fument beaucoup parce que le tabac coûte moins cher. Néanmoins, on constate que malgré que le Maroc taxe son tabac à hauteur de 75% du prix, les Marocains sont les plus gros fumeurs, il y a plus de toxicomanes. Donc, il y a 19% de taux de prévalence chez les adultes et ils sont à égalité avec les sierra-léonais, nos voisins selon les données de l’OMS que j’ai exploitées. Par rapport à la situation guinéenne, on estimait avant à 16% le taux d’imposition, mais ce qu’il faut dire, c’est qu’il n’y avait pas un cadre légal bien établi, il n’y avait pas une loi précise qui prévoyait cela. Il y avait beaucoup plus d’arrangements entre les importateurs de tabac et les autorités du pays » a-t-il indiqué.
Pour sa part, Mamadou Yacine Diallo un autre journaliste du groupe a travaillé sur la question qui se rapporte à la subvention du riz importé alors que la production locale est de meilleure qualité. Il a fait savoir que le régime défunt avait eu beaucoup d’initiatives qui visent à favoriser la production du riz locale pour que la Guinée  tourne le dos à l’importation. Mais, la stratégie n’a pas marché.
« Ce qui ressort de l’enquête que nous avons menée, c’est qu’au lieu de travailler à rendre effective l’autosuffisance alimentaire, lui, son gouvernement et bien d’autres acteurs qui gravitaient autour, ont plutôt donné la force à l’importation du riz. Sur la production locale, nous avons constaté d’énormes problèmes. Pendant les 11 ans de règne du professeur Alpha Condé, la filière riz n’a pas du tout connu le décollage auquel on s’attendait. Au contraire il n’a cessé de souffrir du manque d’investissements  » a-t-il souligné.
Mamadou Adama Diallo, lui aussi reporter du satirique Lynx a mené son enquête sur le système carcéral en Guinée. Il indique que les conditions de vie carcérale laissent toujours à désirer en République de Guinée.
 » Selon un rapport des Nations-Unies sur les droits de l’homme en Guinée qui date de 2019, le pays compte en tout huit maisons centrales dont cinq du ressort de Conakry, trois du ressort de Kankan. Il y a 23 prisons civiles dont 13 à Conakry et 10 à Kankan. Le système carcéral guinéen est déliquescent, les infrastructures pénitentiaires ne sont pas adaptées du tout. À commencer par la maison centrale de Conakry, on n’a pas exactement les chiffres, mais on parle de 1400 et 1600 prisonniers alors que la maison centrale ne devait contenir que 300 personnes. Donc, ce qui revient à dire que nos prisons sont plutôt des mouroirs au lieu d’être des centres de rééducation et de réinsertion sociale » devoile-t-il.
Mamadou Siré Diallo, le rédacteur en chef du groupe Lynx lui s’est intéressé aux élections en Guinée.

Entre 2015 et 2020, les élections ont englouti pas moins de 1 695 milliards de francs guinéens, près de 139 millions d’euros (taux du 5 février 2021). Ce montant représentait plus du tiers du budget prévu pour la construction de la route nationale Numéro 1 Coyah-Mamou-Dabola de 370 km, évalué à 357 302 942 euros. Mais sa gestion n’a connu aucune visibilité et s’est déroulée dans une opacité inédite. Il n’a connu d’audit, ni interne ni externe. Or, la loi, L 044, alors en vigueur, modifiant certaines dispositions de la loi organique L/016 du CNT, portant composition, organisation, attributions et fonctionnement de la CENI, indiquait en son article 26, alinéa 1 : «Dans l’exécution de son budget, la CENI procède au moins une fois par an à un audit interne, afin de s’assurer de l’application correcte des règles de gestion budgétaire en vigueur.» Les alinéas 2 et 3 du même article ajoutent : «La CENI est soumise annuellement à un audit externe du budget réalisé par un auditeur recruté par voie d’appel d’offres ouvert. L’audit externe est commandité par le Ministère de l’Economie et des Finances. Le rapport issu de cet audit est transmis au Président de la République, à l’Assemblée nationale et à la Cour des comptes. Il est publié au Journal Officiel de la République.»

Ce journaliste a rappelé que ces dispositions étaient également mentionnées dans les alinéas 3, 4 et 5 de l’article 23 de la Loi L016 du CNT 2012. Sur papier, cela paraît facile. Sur le terrain, la réalité était tout autre.

Mamadou Yaya Doumbouya également journaliste de Lynx a mené des investigations sur le secteur minier qui vogue entre pollution et opacité !

Il rapporte que la région de Boké, située à plus de 300 kilomètres au nord-ouest de Conakry, a été érigée en Zone économique spéciale en 2017. Dans cette région riche en bauxite se déroule l’essentiel de l’exploitation de l’or rouge dont le budget national est en grande partie tributaire.

Ce reporter rappelle que le secteur a connu la plus grande croissance ces dix dernières années. Mais cette exploitation, accélérée depuis 2017, affecte les communautés riveraines et leurs moyens de subsistance. L’environnement en pâtit.
Les mesures d’atténuation, de réparation, prévues dans les différents plans de gestion sociale et environnementale des entreprises, ne sont pas au rendez-vous. C’est du moins ce qu’a révélé l’enquête à Boké, en 2020.

Les chiffres actualisés sur la production et l’exportation de la bauxite avec le Bulletin des statistiques minières 2021 du ministère des Mines et de la Géologie indiquent les tonnages suivants :
Production en 2019 : 70 173 326 (t) ; exportation : 66 279 526 (t)
Production en 2020 : 87 776 199 (t) ; exportation : 82 402 511 (t)
Production en 2021 : 87 438 557 (t) ; exportation : 85 658 218 (t)
En résumé, la production de la bauxite a connu une baisse de 0,4% en 2021 par rapport à 2020. Par contre, l’exportation est revue à la hausse, avec 4% en 2021 par rapport à 2020.
Rappelons qu’en 2020, la Guinée s’est hissée à la deuxième place mondiale des producteurs de bauxite.
Temps du CNRD
Quand il prit ses fonctions en novembre 2021, le ministre des Mines et de la Géologie, Moussa Magassouba s’est engagé à s’attaquer « aux racines du mal qui gangrènent » le secteur minier : mauvaise gouvernance, corruption, injustice, insécurité des investissements miniers et des personnels employés du secteur minier, violation du cadre réglementaire.

« Nous allons relire les conventions de base et nous amenderons les clauses s’il y en a. Nous allons nous asseoir autour de la table avec les titulaires des permis pour rediscuter les clauses. Tous les permis dormants et non actifs seront purement et simplement retirés conformément aux dispositions du Code minier », expliquait le ministre Magassouba. Pour l’heure, selon une source au ministère ce travail traîne, bien que lancé.
Impact environnemental
A Boké, montre cette enquete, les eaux de surface (rivières, lacs, ruisseaux) subissent directement les méfaits de l’exploitation minière opérée sur les plateaux bauxitiques situés généralement sur les hauteurs des montages. Aboubacar Kaba, le directeur du LAE (Laboratoire d’analyse environnementale) au ministère de l’Environnement, des Eaux et Forêts, fait savoir que le transport des sédiments dans les cours d’eau, entraîne leur tarissement par endroits.
L’air reste aussi pollué, chargé de poussière, le tout dans une chaleur torride. En ce qui concerne le sol, les sédiments envahissent la zone de façon plus marquée pendant la saison des pluies, avec les eaux de ruissellement. Conséquence : les nutriments des terres arables restent affectés.

Ce qui fait selon l’enquêteur Mamadou Yaya Doumbouya que le rendement agricole s’amenuise progressivement. Adama Modjo Diallo, paysan à Sangaredji : «En 2013, avant l’implantation des sociétés à côté de mon village, j’avais semé sept kilos de riz, j’avais récolté douze sacs. En 2017, après l’ouverture des mines, j’ai repris l’expérience dans le même champ. Mais je n’ai récolté qu’un sac de riz. La boue rouge a détruit tous les nutriments du sol. Certains arbres fleurissent bien, mais au bout d’un moment, tout tombe. C’est le cas aussi de nos champs.»
Quelle part pour les communautés ?
L’ enquête montre que le Code minier de 2011 stipule en son article 130 : «Tout titulaire d’un Titre d’exploitation minière doit contracter une Convention de développement local avec la communauté locale résidant sur ou à proximité immédiate de son Titre d’exploitation minière.»
Entre les conditions floues d’attribution des permis et la gestion opaque des recettes minières par des administrateurs publics, les retombées des activités d’exploitation, notamment dans la zone de Boké, tardent à se faire sentir (https://lelynx.net/2021/01/secteur-minier-guineen-une-opacite-sans-fin/).
Le district de Boulléré (Sangardji) entouré des mines de COBAG, RUSSAL, entre autres, a bénéficié la construction d’un collège de trois classes, inauguré en 2021, dans le cadre de l’ANAFIC, Agence nationale de financement des collectivités.
Le FODEL, Fonds de développement local, a été lancée 2020. Le groupement des jeunes filles de l’espace francophone de la commune urbaine de Boké évoluant dans le maraîchage a reçu un financement de 34 millions de francs guinéens pour financer leurs projets de maraîchages.
Dans la commune rurale de Dabiss (Boké), des bénéficiaires du Fodel dénoncent le mode de financement et de gestion de leurs projets. « Ils ont évalué notre projet à 18 millions de francs guinéens, mais nous n’avons pas reçu l’argent à temps. Notre groupement n’a reçu que 5 millions. Dans les 5 millions, la banque a soutiré 1 million et le district a pris 500 mille. Il y est resté 3 500 mille francs guinéens. C’est avec le reste que nous avons acheté les grillages, les houes et la semence pour le champ. Ça été le cas pour tous les 69 groupements jeunes et femmes financés par le FODEL à Dabiss.

Aucun n’a reçu son financement entièrement », indique avec amertume Mamadou Compo, à l’ONG Action Mines Guinée dans cette enquête du groupe Lynx

Par Mamadou Bailo Diaguissa Sow pour  couleurguinee.com

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