Accueil Economie et société Guinée : La dépréciation du Franc Guinéen et ses conséquences macroéconomiques.

Guinée : La dépréciation du Franc Guinéen et ses conséquences macroéconomiques.

La détérioration du franc guinéen contre l’Euro et le dollar, s’expliquerait par divers facteurs (cf. Analyse théorique des causes et conséquences de la dépréciation du Franc Guinéen paru chez guineematin.com le 21 septembre 2020) notamment celles structurelles relatives à la faible compétitivité ainsi que la non diversification de l’économie guinéenne.

Par ailleurs, les perturbations de l’activité économique suite à l’avènement de la Covid-19 couplés avec les mouvements sociaux liés aux élections présidentielles de 2020 et de ses avatars ont bloqué à un moment donné le circuit économique et influencé le volume des exportations du pays. Ces évènements ont causé également l’arrêt de la production dans plusieurs secteurs économiques occasionnant ainsi la baisse des recettes de l’Etat en devises provenant de l’exportation.

A date, le Franc Guinéen ne joue plus la troisième fonction de toute monnaie qui n’est rien d’autre que la réserve de valeur.Par ailleurs, de par cette fonction, la monnaie permet de reporter des achats dans le futur. Par exemple, dans une économie monétaire, un individu ayant vendu un bien X contre de la monnaie peut ne pas souhaiter dépenser cet argent immédiatement pour acquérir un autre bien Y. Ceci est possible parce que la monnaie est un instrument d’échange actuel mais aussi futur.

Cependant, la monnaie n’est pas le seul instrument qui est capable de conserver de la valeur dans le temps. C’est pourquoi bon nombre de personnes recourent le plus souvent aux titres financiers ou encore aux biens immobiliers etc. contrairement aux autres actifs, la monnaie semble être le meilleur instrument de réserve de valeur parce qu’elle présente deux avantages : i) elle est parfaitement liquide (c’est-à-dire qu’elle est utilisable immédiatement en vue des transactions et sans coûts) ; ii) elle est sans risque alors que pour les actifs financiers par exemple, le détenteur court le risque d’une perte en capital à tout moment.

Tout ceci n’est possible qu’à condition qu’elle garde une valeur stable dans le temps. Or sa valeur dépend du Niveau Général des Prix (NGP). Par conséquent, si ce dernier augmente comme chez le cas aujourd’hui en Guinée, avec le même montant de monnaie vous pouvez acheter une quantité moindre de marchandises. La monnaie n’aura pas rempli dans ce cas, son rôle de réserve de valeur.

Pour restaurer la valeur externe de notre monnaie et assurer la troisième fonction de toute monnaie, la Banque Centrale devra à notre avis restructurer le marché de change de manière à autoriser dans le futur son intervention sur ledit marché en injectant de la devise quand le taux de change dévie de sa trajectoire par rapport au fixing (d’autant que notre régime de change actuel ne le permet pas) sans quoi, les agents économiques à l’image des cambistes agréés de la place auront toujours la possibilité de spéculer sur le Franc Guinéen.

A moyen et long terme l’on doit s’atteler à résoudre le problème de notre déficit commercial structurel. En effet, la Guinée reste caractérisée par l’existence des déficits jumeaux (budgétaire et commercial) avec une croissance économique mitigée c’est-à-dire tirée essentiellement par un seul secteur d’activité. La pression exercée par la demande de devises des agents économiques en contrepartie du Franc Guinéen fera toujours grimper le taux de change, en affaiblissant la monnaie nationale dont l’offre est abondante.

De plus, la BCRG doit veiller au renforcement du contrôle des transactions en devises (origine et destination des fonds), le transfert des soldes journaliers en devises des banques à la Direction de la Supervision Bancaire et aussi la possibilité d’instaurer une zone de sécurité pour la production et l’exportation de l’Or.

Enfin cette petite analyse montre que la résolution de l’épineux problème de changes auquel est confronté notre pays passe essentiellement par la mise en place d’une véritable politique économique en général et une politique de change en particulier   qui s’attaque surtout aux déficits de la balance de commerciale et des finances publiques du pays. Pour y arriver, il sera nécessaire d’impliquer de façon active toutes les institutions économique, monétaire et financière autour d’une réforme majeure dont l’objectif sera l’extraction de l’économie guinéenne des contraintes lourdes qui pèsent sur elle.

Par Mamadou Safayiou DIALLO

Analyste Economique

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